LE DERNIER CARRÉ DES GORILLESC

de pouvoir mener à bien leur mission de protection sur les parcs.

La majeure partie de la viande de brousse est traditionnellement constituée de mammifères ongulés. Des enquêtes réalisées sur les marchés africains ont montré que la viande de grands singes, bien que présente, ne représente qu’1 ou 2% du trafic (Stein, 2002b). Cependant, du fait de leur taux de reproduction extrêmement bas et du dérèglement social qu’entraîne la mort des individus impor- tants, les populations de grands singes déclinent face à n’importe quel niveau de chasse, même minime. Une enquête par photographies aériennes du parc Akagera a dé- montré qu’entre 1994 et 2002, la faune sauvage a décliné de 50 à 80 % du fait des activités humaines, parmi lesquelles l’agriculture, le pastoralisme et la chasse (Lamprey, 2002). L’arrivée d’environ 270 000 têtes de bétail dans la région entourant le parc est aussi un réel danger car il s’ensuit une tendance au surpâturage, à la pro- duction de charbon et au braconnage (Chemonics Intl Inc, 2003). Malgré tous leurs efforts, en l’absence de ressources suffisantes, les gardes forestiers ne disposent que d’une toute petite chance

Le braconnage dépasse souvent les frontières, dans cette région. Les braconniers, généralement d’anciens miliciens opérant au sein ou à proximité des camps de réfugiés (par exemple au Burundi), sont aussi impliqués dans le massacre d’éléphants et la contre- bande d’ivoire. La traque de plusieurs braconniers à la suite de massacres d’éléphants en Tanzanie a ainsi retrouvé des restes de farine de maïs jaune autour des feux de camp montés par les bra- conniers en mouvement. Cette farine de maïs est principalement distribuée dans les camps de réfugiés situés au Burundi, et n’est pas utilisée dans cette région du nord-ouest de la Tanzanie (Nelle- mann et Malata, obs. pers.). L’utilisation de pisteurs et la formation des gardes forestiers aux opérations de traque sont des outils vitaux pour la poursuite des enquêtes face aux crimes contre la faune sau- vage en dehors du système routier et dans toute la région, enquêtes pour lesquelles les tactiques militaires et policières traditionnelles sont souvent dépassées.

Croissance démographique en Afrique centrale et sub-saharienne

Projections de densité de population dans le bassin du Congo Nombre moyen d’habitants par km carré

millions 2 000

Projection

Doublement de la population de 2010 (projection)

Afrique sub-saharienne

1 500

1950

1975

1 000

2010

2050

500

Afrique centrale

0

Source: DAES, Base de données démographiques en ligne, état 23.02.2010

2000 2010

1950

1975

2025

2050

 Figure 15: Dans de nombreuses régions, on chasse intensément au sein des aires pro- tégées pour répondre à la demande de viande de brousse. La majorité de cette viande est transportée à bicyclette vers les plus grandes villes comme Kindu (v. p. 49). La viande de grands singes, parfois fumée, représente quelques pourcents du total, mais les impacts de ce trafic sur les grands singes, dont les taux de reproduction sont extrêmement bas et la structure sociale complexe, sont dévastateurs et hors de proportion.

Figure 14: Le bassin du fleuve Con- go connaît une forte croissance dé- mographique. Il s’ensuit une pression accrue sur l’habitat des grands singes et davantage de gorilles tués pour répondre à la demande de viande de brousse.

52

Made with