LA CRISE DE LA CRIMINALITÉ ENVIRONNEMENTALE

ÉTUDE DE CAS République démocratique du Congo : l’exploitation illégale des ressources naturelles

Le parc national de la Garamba est situé au nord-est du pays, le long de la frontière avec le Soudan du Sud. La LRA et les bandes de braconniers soudanais y font des incursions actives, ainsi que certaines milices, d’après les braconniers locaux qui opèrent en toute impunité dans un climat d’insécurité. La majeure partie du parc est trop dangereuse pour y effectuer des patrouilles. Les gardes- chasse ne peuvent patrouiller que dans le tiers méridional du parc, au sud de la rivière Garamba 107 , et sans véhicule. En 2013, la popu- lation d’éléphants y a chuté de 90 %, passant de 22 000 à environ 2 000 têtes. Le parc abritait les dernières populations sauvages de rhinocéros blanc du Nord avant qu’elles ne soient décimées dans les années 2000 par des bandes de braconniers soudanais, proba- blement les Janjawids 108 . Se déplaçant en bandes de plusieurs dizaines de chasseurs et de porteurs, ces braconniers, généralement armés de fusils AK-47, chassent les éléphants dans le parc et aux alentours 109 . La LRA, opérant sur ordre direct de son leader, Joseph Kony, chasse les éléphants pour vendre l’ivoire aux groupes crimi- nels transnationaux afin de s’approvisionner en armes, munitions, nourriture et autres équipements. En 2009, le groupe a attaqué le siège du parc, tuant 17 de ses employés 110 . Selon les troupes ougan- daises, la LRA serait également à l’origine des caches contenant des défenses d’éléphants découvertes en République centrafricaine 111 .

La République démocratique du Congo est désignée par la CITES comme l’un des deux pays africains les plus probléma- tiques en ce qui concerne l’exploitation illégale des ressources naturelles et de l’ivoire d’éléphant. Dans certaines régions, 90 % des carcasses d’éléphants sont imputables aux bracon- niers 106 . L’ivoire prélevé constitue une monnaie d’échange contre des armes, des munitions, de la nourriture et d’autres instruments servant à maintenir les mouvements d’insurgés. L’Armée de résistance du Seigneur (LRA), les milices Janjawid, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), Maï-Maï Morgan et diverses autres milices armées tuent régu- lièrement des éléphants et des hippopotames pour leur ivoire. Nombre d’entre eux sont directement impliqués dans le trafic de bois, de charbon de bois, d’or et de minerais et ont participé plus ou moins directement à des violations graves des droits de l’homme (assassinats en masse, recrutement d’enfants soldats, enlèvements, travail forcé, esclavage sexuel, pillage de masse et déplacements de masse). Ces groupes armés utilisent et arment les populations locales pour chasser les éléphants à leur place. L’ivoire est accessible aux combattants de niveau inférieur qui ne peuvent bénéficier des systèmes de taxation plus lucratifs contrôlés par leurs supérieurs.

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