LA CRISE DE LA CRIMINALITÉ ENVIRONNEMENTALE

(ou presque) les conflits. Le faible risque que présente le trafic d’espèces sauvages ou de produits forestiers offre également une niche facilitant le financement international de groupes extré- mistes. Au cours des dix dernières années, la CITES, INTERPOL, l’ONUDC (Office desNationsUnies contre la drogue et le crime) et le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement) ont mis en garde contre la montée des réseaux criminels trans- nationaux. Des moyens de plus en plus sophistiqués permettant de procéder à l’extraction illégale des ressources naturelles ainsi que des méthodes perfectionnées de blanchiment des ressources extraites illégalement et des revenus tirés du commerce illégal ont vu le jour 9 . De même, l’incidence du crime organisé (trafic de stupéfiants et d’êtres humains, violence, assassinat et corruption) sur la sécurité individuelle et publique a été mise en lumière. Les acteurs impliqués dans d’autres secteurs criminels sont attirés par la criminalité environnementale, notamment transnationale, qui offre à la fois une possibilité de profits élevés et une faible probabilité de se faire arrêter et condamner 10 . De vives inquiétudes ont été exprimées à propos de la pêche illégale au large des côtes d’Afrique de l’Ouest et de son impact sur les pêcheurs locaux. La pêche illicite, non déclarée et non réglementée, qui représente entre un tiers et la moitié des prises dans la région, est évaluée à 1,3 milliard de dollars US par an 11  et implique des pertes de revenus importantes pour les pays. Par exemple, la pêche illicite au large du Sénégal a représenté une

perte d’environ 300 millions de dollars US en 2012, soit 2 % du PIB national 12 .Cette question avait déjà été abordée pour la Somalie, où des liens avaient été constatés avec la piraterie 13 . Plus préoccupant encore est l’impact de l’exploitation forestière illégale sur les émissions de carbone et la perte de revenus. La déforestation des régions tropicales représente 10 % à 15 % des émissions mondiales. On estime entre 50 % et 90 % la part de l’exploitation illégale dans les principaux pays tropicaux 14 , ce phénomène menaçant directement les plans et programmes de réduction des émissions tels que REDD, REDD+ et ONU- REDD. L’ampleur et l’essor des réseaux criminels transnationaux mettent également en péril la sécurité individuelle et publique en favori- sant la propagation de la corruption. Pour de nombreux pays, qui voient la plus grande partie des recettes leur échapper au profit des paradis fiscaux ou de ressortissants étrangers, le manque à gagner en termes de développement économique a des répercus- sions sur la sécurité alimentaire, l’environnement et les services écosystémiques dont bénéficient les populations locales. Ampleur de la criminalité environnementale L’impact économique de la perte de ressources et de revenus due à la criminalité environnementale (notamment l’exploita- tion forestière et la pêche illégales) est important et équivaudrait, voire dépasserait largement, le montant total de l’aide publique au développement (soit 135 milliards de dollars US).

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