CARBONE VERT, MARCHÉ NOIR

PRÉFACE Les atteintes à l’environnement et l’accaparement illégal des ressources naturelles de- viennent de plus en plus sophistiqués et obligent les autorités nationales et les forces de l’ordre à élaborer des réponses proportionnelles à l’ampleur et à la complexité du défi qui consiste à garder une longueur d’avance.

Pour s’assurer du succès du programme REDD+, les montants versés aux communautés pour leurs actions de conservation doivent être plus importants que les gains tirés d’activités qui dégradent l’environnement. L’exploitation illégale est une menace pour ce système de paiement si les sommes illégales passant de mains en mains sont plus importantes que les ver- sements effectués au titre dudit programme. Les forêts mondiales représentent l’un des piliers les plus impor- tants pour lutter contre le changement climatique et assurer le dé- veloppement durable. Selon les estimations, la déforestation, qui concerne principalement les forêts tropicales humides, est à l’ori- gine de 17 % de l’ensemble des émissions induites par l’homme, soit 50 % de plus que les émissions générées par les transports maritime, aérien et terrestre combinés. Aujourd’hui, il ne reste qu’un dixième de la surface mondiale des forêts primaires. Les forêts préservent la biodiversité et fournissent également des ressources en eau, des produits médicinaux, des nutri- ments recyclés pour l’agriculture et elles jouent un rôle dans la prévention des inondations ; elles sont cruciales pour la tran- sition vers une économie verte dans le contexte du développe- ment durable et de l’éradication de la pauvreté. Une collaboration internationale renforcée en matière de législa- tion environnementale et de son application n’est par conséquent pas qu’une option parmi d’autres. C’est en réalité la seule réponse pour lutter contre une criminalité internationale organisée qui me- nace les ressources naturelles, la soutenabilité environnementale et les efforts visant à sortir des millions de personnes de la misère.

Le présent rapport « Carbone vert, marché noir » du PNUE et d’Interpol met l’accent sur l’exploitation illégale du bois et ses conséquences sur la vie et les moyens de subsistance de certaines des populations les plus pauvres au monde, sans par- ler des dégâts environnementaux. Il souligne comment les cri- minels recourent à une combinaison de méthodes anciennes, telles que les pots-de-vin, et de méthodes de pointe, telles que le piratage informatique, pour obtenir des permis de transport ou autres. Il se concentre en outre sur les techniques de plus en plus sophistiquées utilisées pour blanchir des grumes illégales grâce à un réseau de plantations de palmiers à huile, d’axes routiers et de scieries. Il explique clairement que l’exploitation illégale ne diminue pas, bien au contraire, car les cartels sont mieux organisés et déplacent notamment leurs activités illégales afin d’échapper aux services de police locaux ou nationaux. Selon certaines esti- mations, entre 15 % et 30 % des volumes de bois commercia- lisés dans le monde sont obtenus de manière illégale. Si rien n’est fait, les actes criminels de quelques-uns pourront compro- mettre non seulement les perspectives de développement de beaucoup d’autres, mais aussi certaines des initiatives créatives et inspiratrices qui sont introduites et destinées à récompenser les pays et les communautés pour les services écosystémiques offerts par les forêts. L’un des principaux instruments permettant d’initier un chan- gement environnemental positif et un développement durable est l’initiative de réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation de la forêt (REDD ou REDD+). Si l’on veut que l’initiative REDD+ soit pérenne à long terme, cela exige, d’une part, que tous les partenaires ajustent leurs opérations et veillent à respecter les normes de rigueur les plus élevées et, d’autre part, que les efforts de réduction de la déforestation dans une zone donnée ne soient pas contrebalancés par une augmentation ailleurs.

Achim Steiner Sous-secrétaire général des Nations Unies et directeur exécutif du PNUE

Ronald K. Noble Secrétaire général d’Interpol

5

Made with